La collection renaît de ses cendres et ouvre ses portes à tous les passionnés de cette littérature.
Ce qui est nouveau pour notre Phénix, c’est de voir émerger des talents qui, chacun à leur manière, contribuent à une réflexion de fond sur ce phénomène unique de l’édition française.
Dans le sillage de l’approche initiée par Alain Jamot dans ses chroniques de l’Intégrale Joubert-Signe de Piste, nous avons d’abord accueilli sur ce blog officiel du Signe de Piste deux textes superbes de Pierre Schneider, S'il n'en fallait qu'un seul... et Littérature scoute .
Au tour maintenant de Philippe Maurel, dont nous reprenons une contribution au forum Jeuxdepiste.com mené de main de maître par Mic Bonvalet, et consistant en une réflexion sur la figure de l’immigré dans le Signe de Piste, dans le cadre d'un échange avec Alain Gout :
Peut-être y a-t-il d’autres personnages de "beur" dans les romans du signe de piste publiés dans les années soixante.. […]
Ce qui me semble intéressant dans la collection, c’est que de nombreux ouvrages entraient en résonance avec les préoccupations spécifiques de l’époque. Plusieurs romans ont eu pour arrière-fond le thème de la réconciliation franco-allemande (Conrad, Le glaive de Cologne, Les compagnons de la Loue, Faon l’héroïque, et peut-être la prémonition, La mort d’Éric). Cette problématique-là me semble aujourd’hui un peu obsolète et on peut difficilement imaginer des romans contemporains qui traitent du même sujet.
Par contre le personnage de l’immigré ou du beur, qui renvoie à une question brûlante et lancinante de notre actualité, peut être un filon thématique intéressant pour un nouveau Signe de Piste en le raccordant à des valeurs qui animent la collection (amitié, confrontation, échange, quête initiatique, découverte de l’altérité, acceptation des différences mais dans un creuset commun).
Je ne suis pas sûr que le personnage du beur de "Marco" corresponde parfaitement à cet archétype puisque le roman me semble être situé dans un contexte historique où la décolonisation n’était pas encore achevée, c’est-à-dire à une période où l"indigène" (figure plutôt sympathique et adulée) n’est pas encore l’immigré (plutôt enclin à susciter le rejet et la xénophobie).
Le jeune marocain des Gants de cuir est, pour le coup un "vrai" immigré et c’est toute l’habileté du romancier que d’agencer les rapports entre lui et le héros sans dénaturer la question de leurs origines mais sans en faire une source d’antagonisme. L’apprentissage du respect mutuel est une des clés du livre (me semble-t-il). Je me rappelle la scène poignante où le jeune Karim est contraint d’abandonner la boxe comme s’il venait de rater le marchepied de l’intégration et c’est le héros qui va l’aider à surmonter son désespoir (je n’en dis pas plus, il faut lire le livre !).
Pour ceux, en tout cas qui sont attentifs aux dernières parutions de romans pour la jeunesse, peut être auront-ils comme moi l’envie de voir dépasser le manichéisme, l’angélisme, l’insistante description de l’immigré comme une figure universelle des réprouvés, qui trop souvent oriente leur contenu. Le respect n’est pas la pitié et encore moins le sacrifice à toutes sortes de préjugés idéologiques. […]
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