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27 avril 2009

Commentaires

Alain Jamot

Ce qui est intéressant dans le bouquin de Buisson, c’est de voir que le SDP, après avoir été vilipendé des années durant par la gauche, l’est désormais par sa famille idéologique naturelle, la droite. Étonnant retournement !

Buisson semble également prendre ses désirs pour des réalités, car en dehors des fascistes déclarés type Je suis partout (et la fameuse déclaration de Brasillach), la pulsion homoérotique pour l’éphèbe aryen ou la « brute blonde », reste largement un fantasme, sans guère de traces ou de sources fiables à exploiter.

Le même Brasillach, quelque temps avant sa condamnation à mort, revenait là-dessus en écrivant « Des journalistes m'ont reproché avec horreur d'avoir écrit un jour dans un article que, pendant ces quatre ans, les plus lucides d'entre nous ont tous plus ou moins couché avec l'Allemagne, et que le souvenir leur en restera doux. J'aurais pu leur répondre, si j'en avais eu la liberté, que c'est là précisément une phrase de rupture amoureuse, et ce que l'on écrit quand tout est fini, et qu'il reste le regret et la courtoisie. » (Lettre à un soldat de la classe 60).

Il s’agit bien donc d’un argument idéologique largement métaphorique (même si l’on connait aujourd’hui les tendances homosexuelles de Brasillach ou d’Abel Bonnard), monté en épingle pour la bonne cause et permettant de charger encore davantage les collabos, l’homosexualité étant encore réprimée pénalement en France en 1944.

Enfin Buisson commet un contresens historique en parlant d’une influence de la Hitlerjugend sur le scoutisme, car il s’agit bien du contraire : la HJ, à partir de la loi du 1er décembre 1936, a intégré de force tous les éclaireurs dans le mouvement de jeunesse nazi officiel, et ses dirigeants ont longuement intrigué, sans succès, pour que la HJ puisse participer aux Jamboree et acquérir ainsi une reconnaissance officielle du mouvement. BP faillit tomber dans le panneau, et on doit aux membres du Bureau International du Scoutisme, conscients de la dimension totalitaire du nazisme, d’avoir évité le pire. Sans jamais oublier également que le scoutisme fut fondé 20 ans avant la HJ !

Buisson n’est pas le seul, le NouvelObs a été condamné pour avoir comparé les Scouts d’Europe à la HJ, et c’est devenu un lieu commun sur les forums de dénigrer le scoutisme tradi en mettant en avant cette contre-vérité. Quiconque s’est sérieusement penché sur l’histoire des mouvements de jeunesse totalitaires nazis, fascistes, communistes ou collabos sait la dette qu’ils ont tous envers le scoutisme, et que ses innovations ont été systématiquement pillées.

Je connais même une couverture de la revue de la HJ « Der Pimpf », de septembre 1938, qui semble directement pompée sur la couverture du Bracelet, paru deux ans auparavant. Coïncidences, influences, source commune ? Le dossier serait à creuser, mais ni Joubert ni Dalens n’ont jamais été nazis, ni influencés par le nazisme. Ce type d’amalgame révèle une culture historique plutôt défaillante, et un ton un peu trop enflammé pour être honnête.

Mais Buisson est un journaliste, il a écrit un livre de journaliste bien croustillant, et qui doit bien se vendre, ne cherchons pas plus loin. La véritable histoire idéologique du SDP reste à écrire…

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